Paroles d’Élus – Ambenay… une boulangerie devenue verger

Madame le Maire, pourriez-vous nous raconter la genèse de ce projet et les étapes qui ont permis de le mener ?

Il y a une quinzaine d’années, nous avions une boulangerie… Lorsque l’activité s’est arrêtée, le bien a été vendu aux enchères, acheté par un privé et mis en location. Le locataire a laissé, peu à peu, le bien se dégrader. Des épaves de voitures étaient entreposées sur le terrain devenu « garage » et nous recevions des doléances des riverains. Nous avons alors proposé au propriétaire de racheter le bien.

Nous nous sommes ensuite rapprochés de l’EPFN pour nous accompagner afin de bénéficier d’un portage par leur intermédiaire.

La question du devenir du bien s’est rapidement posée car nous ne savions pas ce que nous pouvions en faire compte tenu de sa vétusté et de l’ampleur des dégradations, sans parler de la pollution induite par le stockage des épaves.

L’étude flash, financée par l’EPFN, a préconisé une démolition du bâtiment. La seconde étude, également menée et financée par l’EPFN, a mis en lumière le passé de ce secteur qui était autrefois une pommeraie. Le Bureau d’études nous a vraiment permis de nous approprier l’histoire du cœur de village avant de nous lancer dans la phase opérationnelle. C’est intéressant de partir d’où l’on vient pour comprendre et choisir là où l’on va. C’est ainsi que la création d’un verger est devenu une évidence. Elle a pu être menée avec le soutien de la Région (au travers des fonds Leader et des Études menées par l’EPFN), de l’Agence de l’Eau, et grâce aux conseils et recommandations de l’ABF qui y voyait une opportunité de mettre en valeur notre église.

Les travaux ont permis de restituer au site son aspect naturel initial, totalement dépourvu de réseaux, pour qu’il puisse accueillir les plantations tout en assurant une meilleure gestion des eaux de ruissellement. Toujours dans l’optique de mettre en valeur notre patrimoine historique et naturel, deux bancs ont été confectionnés, un kiosque implanté et le belvédère aménagé Une petite mare a été créée afin d’absorber le trop-plein de la RD et de canaliser les eaux pluviales ce qui était d’autant plus important pour nous que nous avions subi d’importantes inondations en 2018.

Comment les habitants ont-ils réagit à l’annonce de ce projet et comment y ont-ils été associés ?

Des d’interrogations nous ont été remontées sur le pourquoi on faisait cela, pourquoi on ne décidait pas de recréer une boulangerie ? Tout simplement, parce que notre zone de chalandise n’aurait pas permis à ce commerce de survivre et parce que le bâti été trop dégradé pour envisager une rénovation. Avec le temps, les habitants ont fini par adhérer. 

Avec l’accompagnement de l’association de pomologie de Normandie, les habitants ont pu être associés au travers d’ateliers. Des dégustations de pommes nous ont été proposées afin de choisir, par vote populaire, les variétés à greffer. Des ateliers de plantation des portes greffes, tailles et greffes ont été également proposés

PAROLE D’EXPERT
Établissement Public Foncier de Normandie

Dans la perspective d’un développement de ses actions en faveur de la renaturation, l’EPF a proposé à la commune de poursuivre le partenariat initié et de l’accompagner dans la réalisation d’une étude complémentaire financée intégralement par l’EPF, pour permettre à la collectivité de valoriser le site, en créant un aménagement favorisant la reconstitution de la biodiversité et offrant un espace partagé à sa population. Les habitants ont d’ailleurs été associés durant les phases de définition et conception du projet ainsi que l’association de Pomologie de Normandie.

Pour soutenir ce projet de renaturation appuyé sur un site en friche et nécessitant des travaux de démolition et de désimperméabilisation porté par les élus d’Ambenay, l’EPF a mis en œuvre une minoration exceptionnelle de la charge foncière du site. Depuis cette première expérimentation, l’EPF a pu déployer d’autres interventions auprès de collectivités normandes, notamment en mettant l’accent sur la re-
fonctionnalisation des sols.

Avez-vous rencontré des difficultés pour mener à bien ce projet de renaturation ?

Ce fut une période complexe car nous étions en plein COVID. La démolition a été faite entre deux confinements. Il y avait aussi des dégradations sur la commune à cette période et nous avons été amenés à nous questionner sur ce projet. Devions-nous le mener au bout au risque de voir le site saccagé ? Nous n’avons pas baissé les bras et le résultat est superbe. Cela donne une autre vision du cœur de bourg et du végétal et une magnifique vue sur l’église.

Le montage financier a-t-il posé des problématiques particulières ?

Ce projet a pu voir le jour sans mettre la commune en difficulté grâce au portage EPFN d’une durée de cinq ans. Nous avons provisionné une somme chaque année au budget pour anticiper la fin du portage et le rachat de la parcelle. Au bout de trois ans, notre provision était suffisante pour couvrir l’acquisition, grâce à la minoration sur le rachat mise en place pour la 1ère fois par l’EPFN.

 Nous avons également bénéficié de subventions, ce qui rend réalisable nos projets.

 Avant toute dépense, nous contrôlons que la commune est en capacité de l’absorber sans la mettre en difficulté, comme nous le ferions dans notre gestion quotidienne.

Un message que vous souhaiteriez faire passer ?

Il y aurait tellement à dire…

Ce projet montre que l’on peut faire avancer les choses, créer des projets en restant simples et avec des moyens raisonnés.

Le mot de la fin ?

 Je suis maire depuis 2001 et élue depuis 1995 et je constate que les gens sont de plus en plus individualistes et exigeants. On perd un peu de notre esprit de communauté. On a du mal à susciter l’intérêt et c’est compliqué de faire bouger les gens désormais.

Faire accepter le changement prend du temps. Au début, cela suscite du mécontentement, des réclamations, puis, après un certain temps, les habitants sont contents.

Sylvie Cormier, Maire d’Ambenay.

Une naissance un arbre

Nous avons candidaté à la seconde vague de l’appel à projet « 1 naissance 1 arbre » mis en œuvre par le Département de l’Eure.

En effet, nous avons deux places au sein de la commune dont une grande enherbée en Centre Bourg. Cette place est utilisée lors d’évènements tels que la brocante du 1er dimanche d’août. Avec le changement climatique, il nous a paru important de réfléchir à un aménageme

nt de cette place permettant de maintenir les évènements tout en créant un ilot de fraicheur pour les générations futures. Nos enfants et petits-enfants seront contents d’avoir de l’ombre et de la fraîcheur, je pense. Nous avions pour projet de créer une sorte de poumon vert dans la commune tout en réalisant une continuité, une logique permettant de relier tous les sites ouverts au public.

801 arbres ont pu être plantés sur nos deux places grâce à ce dispositif avec le concours de l’Office National des Forêts et des pépinières lauréates.

Nous avons fait le choix de nous laisser accompagner durant toute la mise en œuvre et nous ne le regrettons pas.

Végétalisation du cimetière

Notre cimetière a été l’un des premiers à être végétalisé, à l’époque avec l’aide de l’AESN. En effet, en 2018, le SAEP devait mener des investissements éligibles à subventions de l’Agence de l’Eau. Une des conditions de l’octroi de cette aide financière était l’adhésion de la commune à la Charte d’entretien des espaces publics impliquant un engagement de la commune à ne plus utiliser de produits phytosanitaires pour entretenir ses espaces verts. Cela nous a motivé à mener des actions comme la végétalisation de notre cimetière.

Il a été assez compliqué de faire adhérer une partie des habitants à ce projet dans la phase intermédiaire. Des ateliers ont été organisés pour sensibiliser la population lorsque nous nous ne pouvions plus utiliser de produits phytos, mais que la végétalisation n’était pas encore totalement finalisée. Des bénévoles nous ont aidés à désherber durant cette période.

En dehors des zones enherbées, une allée (enrobée rose) a été réalisée pour permettre l’accès des véhicules de pompes funèbres notamment et une allée gravillonnée est réservée au cheminement piétons.

Forcément, la végétalisation, l’arrêt des produits phytos et la création d’espaces naturels ont un impact sur les charges d’entretien, mais le résultat est remarquable.

Reconversion de l'école en centre de loisirs intercommunal

Nous étions en regroupement pédagogique avec nos voisins de Neaufles-Auvergny jusqu’en 2018. Au fur et à mesure des années, les effectifs diminuaient et il devenait de plus en plus compliqué d’assurer un enseignement de qualité pour nos enfants.

Il nous avait été annoncé par l’académie à terme la création de deux gros pôles scolaires sur notre territoire…

La fermeture d’une école est une décision très difficile à prendre lorsque l’on est maire, mais il faut savoir penser aux enfants avant de penser à nous. Pour leur avenir, il était évident que la solution n’était plus ici. Avec quatre niveaux au sein d’une même classe, le niveau scolaire n’aurait pas été de qualité.

Lorsque la décision de fermer l’école a dû être actée, nous avons accepté à condition de trouver un autre usage pour ce bâtiment communal qui venait, pour partie, d’être rénové. C’est ainsi qu’il a pu être transformé en centre de loisirs intercommunal.

Les habitants ont plutôt été favorables à cette décision car ils voyaient essentiellement les problématiques liées au niveau scolaire de leurs enfants et parce que le transport scolaire déjà présent sur la commune du fait du regroupement était étendu vers Rugles. Aussi, cela ne changeait pas vraiment les habitudes de vie ou les rythmes de chacun.

Le centre de loisirs accueille désormais plus d’enfants que l’école n’en accueillait. C’est en moyenne entre 20 et 40 enfants qui se retrouvent les mercredis et lors des vacances scolaires. Le transport entre Neaufles et Ambenay a été maintenu ainsi que les cantines dans chaque structure (Neaufles accueille les maternelles et nous accueillons les primaires). L’agent qui travaillait au sein de l’école a été mis à disposition de l’interco avant d’être intégré dans les effectifs de l’INSE.

Comme je le faisais avec l’école, tous les deux à trois ans, j’organise une journée en compagnie des enfants du Centre de loisirs pour leur expliquer le fonctionnement de la mairie. Le matin nous organisons des élections, l’après-midi nous effectuons un baptême civil et nous clôturons la journée par un mariage. Cela permet de leur expliquer la citoyenneté de manière ludique.

J’ai adoré tout ce que j’ai pu faire avec les enfants. C’est avec eux que l’on pourra faire avancer les choses.